Suite à l’agitation médiatique concernant les pilules de troisième génération, voici un point sur ce que vous devez savoir :
Un contraceptif oral contient toujours une substance apparentée à la progestérone : un progestatif. Il est le plus souvent associé à une autre hormone : un estrogène. Depuis 1960, l’industrie pharmaceutique a cherché à inventer de nouveaux progestatifs qui provoqueraient moins d’effets indésirables, et l’on décrit 4 générations de ces substances :
Les 1ère et 2ème générations présentent peu de différences: la norethistérone, le norgestrel, et le lévonorgestrel.
La 3ème génération comporte : le désogestrel, le gestodène et le norgestimate.
La 4ème génération est la drospirénone, parfois fusionnée avec la 3e génération.
1/ Une pilule est un médicament, il y a donc des risques
- La prise de tout contraceptif oral augmente le risque d’accident vasculaire, essentiellement par formation d’un caillot dans une veine (phlébite, embolie), plus rarement dans une artère (AVC). La majorité des caillots ne provoquent pas de séquelles, comme la phlébite, nécessitant seulement un traitement anticoagulant prolongé.
Ce risque devient notable en cas de tabagisme et/ou d’obésité et/ou d’hypercholestérolémie, et important en cas d’antécédents familiaux de ce type d’accidents.
-Les pilules de troisième génération semblent augmenter les risques de façon plus importante
Les pilules contenant des progestatifs de 1ère et 2ème génération semblent augmenter le risque de caillot: il passe de 1/10 000 à 2/10 000 chaque année par rapport aux non-utilisatrices de contracteptif oral. Les pilules de 3ème génération semblent le multiplier par deux, le faisant passer à 4/10 000 chaque année. Je dis "semblent" car nous n’avons pas de preuve formelle : lorsque nous comparons la fréquence des accidents, nous ne pouvons pas être certains que ces femmes sont totalement comparables, et que la différence observée est uniquement due à la nature de la pilule. Néanmoins, la convergence des travaux scientifiques allant dans ce sens rendent cette augmentation de risque très probable.
Il n’est donc pas logique de prescrire en première intention une pilule de 3ème génération. De plus, le surcroît de risque n’est justifié par aucun élément scientifique en matière de meilleure tolérance attendue (prise de poids, migraines, acné). Il semble néanmoins possible de les essayer en deuxième intention, chez une femme qui tolère mal les 1ère et 2ème générations.
Voici la liste des contraceptifs oraux dits de 3ème génération et commercialisés en France :
Contraceptifs contenant du désogestrel
DESOBEL generique
DESOGESTREL RATIOPHARM generique
DESOGESTREL/ETHINYLESTRADIOL BIOGARAN generique
MERCILON
VARNOLINE
CARLIN générique
EDENELLE générique
EFEZIAL générique
FELIXITA générique
GESTODÈNE/ÉTHINYLESTRADIOL générique
HARMONET
MELIANE
MELODIA
MINESSE
MINULET
MONEVA
OPTINESSE générique
PERLÉANE générique
PHAEVA
SYLVIANE générique
CILEST
EFFIPREV
TRIAFEMI
TRICILEST
Enfin, les pilules contenant de la drospirénone (4ème génération) semblent exposer à un risque encore plus important que celle de 3ème génération. Il en est de même pour les traitements de l’acné contenant de la cyprotérone (Diane 35 et génériques).
2/ Néanmoins, les risques sont extrêmement faibles !
1 "chance" sur 10000 tous les ans de faire un accident chez les non-utilisatrices de pilule.
2 sur 10000 pour les utilisatrices de pilule de 1 et 2ème génération.
4 sur 10000 pour les utilisatrices de pilule de 3ème et 4ème génération.
6 sur 10000 pour une femme pendant une grossesse.
Le tout sans certitude : la probabilité pour que ce surcroît de risque soit lié à un biais statistique (les utilisatrices de ces pilules n’auraient pas le même risque de base) n’est pas nulle.
Ces probabilités concernent des accidents sérieux comme des phlébites, mais qui se traitent bien et guérissent le plus souvent sans séquelles. Ce dont on parle dans les médias actuellement, c’est d’accidents vasculaires cérébraux ou d’embolies pulmonaires graves. Ces deux complications sont beaucoup plus rares et il y a un amalgame entre le risque de phlébite et d’AVC. Une femme sans facteurs de risque familiaux a autant de "chances" de faire un AVC avec séquelles que de gagner le gros lot du loto en jouant 10 € !
3/ Que conclure en pratique ?
Ce débat permet de rappeler que la pilule n’est pas un médicament anodin, et que son rapport bénéfice /risques doit être évalué avant prescription et la patiente correctement informée. Ce qui semble logique, c’est de ne pas donner en première intention les pilules de troisième génération, mais de les réserver aux femmes qui auraient un problème de tolérance avec les deuxièmes générations. Tout en sachant que la preuve que ces pilules donnent moins d’acné ou de maux de tête n’est pas établie.
Par ailleurs, comme l’a recommandé la Haute Autorité de Santé, il n’est pas nécessaire d’arrêter en urgence une pilule de 3ème génération bien supportée, mais il peut être utile d’en parler à son médecin lors de son renouvellement. En effet, les accidents apparaissent généralement en début de traitement, et les accidents graves et irréversibles sont rarissimes. À chaque femme de faire son choix, un choix éclairé par ces informations et celles fournies par son médecin.
tiré du site Atoute.org, Dr Dominique DUPAGNE
Dr Steven GUYADER